Le livre Pierre Pillon, un soldat en 14-18 a obtenu le 4ème prix départemental remis par l'Office National des Anciens Combattants pour le concours des "Petits Artistes de la Mémoire".
Une édition du livre est disponible à la Bibliothèque municipale de Dinan.
Vous trouverez de nouveaux éléments sur la vie de Pierre Pillon dans les tranchées avec des éléments communiqués en juillet 2014 (voir en bas de cette page la correspondance de F. Bois)
Le carnet a été exposé avec les autres lauréats de l'académie au rectorat de Rennes en novembre et décembre 2014.
Retrouvez cette histoire dans l'édition du Petit bleu du 8 mai 2014
http://www.le-petitbleu.fr/2014/05/09/le-poilu-pillon-ressuscite-par-des-ecoliers/
et dans le Télégramme du samedi 28 juin
http://www.letelegramme.fr/cotes-darmor/dinan/index.php
Dessin de couverture, Calypso.
Je m’appelle Jean Pillon, je vous présente
tout de suite mon père car c’est son histoire que je vais vous raconter. Pierre Pillon est né le 18
octobre 1881 à Eréac dans les Côtes-du-Nord. Sa mère s’appelait Adèle Nicolas
et son père s’appelait lui aussi Pierre, il était instituteur. Plus tard, il se
marie avec Marie-Françoise Lucas à Pluduno en 1907, il fait la classe dans
cette commune d’octobre 1900 à Août
1907. Moi je suis né le 2 juin 1908.
En 1907, mon père est nommé à l’école des garçons de Dinan
et ma mère à celle des filles de la rue de la Garaye. C’est à la maternelle de
cette école que j’irai en 1910.
Nous habitons dans les étages de l’école Chauffepieds où ma
mère travaille à partir de 1908.
Mon père a la classe du cours élémentaire. Dans sa
classe de CE2, il y a 40 élèves, c’est beaucoup ! Il a comme directeur M.
Honoré le Dû. C’est une belle école avec des tilleuls dans la cour mais mon
père ne va pas y rester longtemps !
Au début du mois d’août 1914, la guerre est déclarée. Mon
père avait fait son service militaire à St Malo du 14 octobre 1902 au 12
septembre 1903 au 47ème
Régiment d’Infanterie. Il a maintenant 33 ans. Nous sommes le 12 août et
il part de la gare de Dinan pour rejoindre le 25ème Régiment d’Infanterie
à Cherbourg.
Nous étions si heureux tous les trois ! Il va nous manquer et on va
lui manquer aussi…Maman est fatiguée, elle va bientôt accoucher. Papa ne sera
pas là à la naissance du bébé qui arrivera le 21 septembre 1914… Mais il faut
défendre la Patrie !
Dans le régiment de papa il y a 3307 hommes, lui est
soldat de 2ème classe.
Chaque fois que l'on reçoit des cartes, on ne voit que des villes détruites !
Il envoie des photos comme celle où il
regarde les lignes ennemies, bien caché derrière des murs solides faits avec
des briques qu’ils ont repris d’une vieille maison.Sur cette autre photo, il est avec ses camarades au fond d’un
trou formé par une bombe. On le reconnaît bien au milieu, avec sa moustache.
C’est la première bataille le 22 août, une
terrible bataille et à l’appel le soir 1200 hommes manquent, beaucoup
d’officiers aussi sont morts (extrait de l’histoire du 25ème RI).
Papa écrit beaucoup comme ça je peux savoir
comment ça se passe pour lui. Il m’écrit que la nourriture n’est pas bonne,
contrairement à celle de maman. Je n’ai que 6 ans mais moi aussi, je lui écris.
J’ai reçu une lettre le 16
novembre 1914. Papa me dit que c’est gentil que je pense à lui. Il me
recommande d’être bien sage et obéissant sans cela il ne me rapportera pas un
beau casque à pointe, un casque de boche. Il le garde dans son sac.
21 décembre 1914.
« Nous avons tué beaucoup de Prussiens et nous avons fait beaucoup de
prisonniers. Tu en verras peut-être arriver quelques uns à Dinan. En as-tu vu
quelquefois ? »
23 décembre 1914
« C’est demain que le père Noël fait sa tournée dans les cheminées et
qu’il met des jouets dans les sabots des petits enfants sages…Tu me diras donc
ce que tu as trouvé dans tes sabots… ».
4 janvier 1915 « J’ai
vu les boches qui travaillaient dans leurs tranchées. Nous sommes tout près
d’eux et je vois très bien briller leurs casques à pointes. »
11 janvier 1915 « Je reviens des tranchées mais je ne
suis pas très beau. Je suis couvert de boue et je te ferais peur si tu me
voyais dans cet état…»
Moi, je n’aimerais pas être à sa
place !
J’ai envoyé une carte avec
un aéroplane. Papa m’a répondu le 13 janvier 1915 : «Les aéros des boches
s’appellent des taubes, quand nous les voyons nous nous cachons parce qu’ils
nous enverraient des bombes »
Un jour il a écrit quelque chose de terrible : "J'ai tué mon premier boche...Je n'étais pas habitué à tuer des personnes à l'école...pas habitué à voir des corps par terre, la première fois ça m'a choqué..."
21
janvier 1915 « J’ai bien reçu ton courrier ce matin. Les mandarines et les
dragées étaient délicieuses…Ce soir quand il va faire nuit j’irai encore dans
mon terrier, il n’y fait pas bon tu sais car il pleut tous les jours, et puis
il y a un boche qui nous envoie toujours des coups de fusil. Nous l’appelons Dominique…Il
est je crois dans une des maisons de Beaurains. Ces jours-ci les maisons
sauteront alors tu parles, qu’est-ce qu’il prendra le pauvre Dominique !
23 janvier 1915:
« Dominique est toujours caché dans son petit coin et toujours le bougre
nous envoie des coups de fusil »…
25 janvier 1915 : « Nous avons mis le feu dans les
maisons de Beaurains. Je crois que Dominique a grillé comme une
saucisse ! »
7 mars 1915
Mon petit Jean,
J’ai bien reçu ta lettre hier soir. Tu me racontes que tu as
joué à la guerre avec tes camarades mais mon petit caporal, as-tu fait des
prisonniers, as-tu tué des boches ? Tu n’en parles pas ! As-tu creusé
des tranchées, es-tu en première ligne ou en seconde ligne ? Je ne peux te
trouver de casque.
Ces jours-ci quand nous cognerons sur les boches nous en
aurons tout plein.
Je t’embrasse bien fort mon gros Jeannot.
Ton papa qui t’aime bien
20 août 1915 : « Me voici en pleine forêt, dans
une grande forêt où on ne rencontre plus de loups, mais où il y a beaucoup de
boches.
Je me suis battu plusieurs fois depuis mon arrivée ici et le terrain est
couvert de cadavres boches, de fusils, de sacs, de casques, tout cela parmi les
arbres que les obus ont brisés…. »
On le décrit en 1915 comme
« sérieux, consciencieux et calme, intelligent et énergique, bon officier,
brave ». Il commande une section. C’est un peu comme dans sa classe mais
là c’est la guerre.Il est nommé sergent le 5
juin 1915, puis à titre temporaire sous-lieutenant le 23 juin.
Ses chefs apprécient son
comportement. Le 30 juin 1915, il est cité à l'Ordre de la Brigade : " Se
présente constamment comme volontaire pour chercher les blessés sur le champ de
bataille. S'est particulièrement distingué les 3 et 11 juin en ramenant
plusieurs blessés".

Je suis inquiet car papa est blessé à la main
gauche par un éclat d’obus. Nous sommes le 19 juillet 1915. J’ai peur que sa
plaie s’infecte. Mais quand il envoie sa photo dans son lit et qu’il est
convalescent je me dis qu’au moins il n’est pas dans les tranchées à risquer sa
vie…Papa a encore été blessé mais le 3 janvier 1916, rentré de
convalescence, il est réaffecté à la 7ème compagnie. Il retrouve les
autres officiers du 2ème bataillon : Brunet, le lieutenant et
Colin, l’autre sous-lieutenant comme lui.
Ce qui doit lui remonter le
moral c’est que le 31 août, il est cité à l’ordre du régiment : " A dirigé
le 30 août 1916, avec bravoure, intelligence et sang-froid une reconnaissance
périlleuse de la ligne ennemie ; a rapporté des renseignements précis. "
Les rares moments où papa
n’est pas dans les tranchées, c’est qu’il est blessé ou qu’il revient en
permission à Dinan. Ce n’est pas assez souvent mais on passe de bons moments.
On va au kiosque à musique de la place Duguesclin ou on se promène le long des
remparts.
En septembre 1916, le régiment se déplace pour
l’offensive de la Somme à Chilly. C’est une terrible bataille et ce n’est pas
fini. En octobre, dans le journal de campagne de son régiment, on peut lire que les hommes ont été repoussés dans la tranchée du saucisson et dans le boyau du sommeil. On rejoint une tranchée par un boyau. Dans le Bois de Chaulnes, on a aussi les tranchées du sagouin, du sofa, de Guillaume et les boyaux du sultan, du soupçon...
Ses camarades sont tombés un par un au combat dans les
bombardements sur le village de Méharicourt. Brunet est tué le 6 août et Colin
blessé grièvement. Alors en octobre 1916 il prend le commandement de la 10ème
compagnie du 3ème bataillon; Il reçoit encore des compliments :
« d’un jugement droit et sûr, payant de sa personne, montrant l’exemple en
toutes circonstances… »
En janvier 1917, pendant 5
semaines, le régiment de papa est au camp de Crèvecoeur-le-grand, dans la neige
et le froid. Parfois il fait 10 degrés en dessous de 0. Ensuite il faut aller
en Champagne, dans le secteur de Prosnes, au Mont Cornillet.
Le 21 mai 1917, la 10ème compagnie participe à
une nouvelle offensive sous le feu des mitrailleuses allemandes. Elle est en
première ligne. Elle atteint son objectif mais doit se replier devant une
contre attaque immédiate…Elle perd ainsi une bonne partie de son effectif. Tout
le monde ne revient pas, surtout la personne qui compte le plus au monde pour
moi.
Le lieutenant a été tué !
C’est le sous-lieutenant Désiré qui prend provisoirement le
commandement de la compagnie.
Pierre Laveissière, lieutenant, Arthur Lemière, brancardier
et Charles Hamon, soldat de 2ème classe sont les trois témoins de sa
mort sur le champ de bataille à 4
heures, ce 21 mai 1917 à Prosnes dans la Marne.
La tombe de papa est provisoirement creusée, pas très loin
du front, nous sommes allés la voir avec maman. Plus tard on rapportera son
corps à Plancoët…
Dans le journal de Dinan, il y a eu un petit article pour
parler de sa disparition….
Le 23 mai, avec 18 officiers et 460 hommes en moins, le
régiment quitte la région des Monts, se repose pendant trois semaines et part
pour Verdun.
L’enfer, toujours l’enfer ! Beaucoup vont tout droit
vers la mort !
Avec mon frère, nous avons été adoptés par la nation le 2
octobre 1918, c’est ce qu’on dit pour les orphelins quand votre père a été tué
à la guerre. Un mois plus tard, le 11 novembre 1918, c’était
l’Armistice…. Enfin ! Mais à Dinan 273 soldats sont morts à cause de cette
guerre. Ils auront leur nom sur le monument aux morts inauguré en 1922.
Maintenant maman s’habille tout en noir.

Je me suis rendu compte plus tard en lisant l'historique du
25ème R.I. que papa était un peu célèbre. On parle de lui au moment
de l'attaque du Mont Cornillet le 21 mai 1917: « Pendant quatre heures,
malgré l'hécatombe terrible, officiers et soldats rivalisent d'ardeur et de
ténacité. Le lieutenant Pillon, commandant la 10ème compagnie, trois
fois blessé, continue ses tentatives d'approche jusqu'à ce qu'il soit tué par
une balle dans la tête. C'est ce brave qui, la veille, avait répondu à celui
qui lui faisait remarquer sa ténacité dans ses reconnaissances personnelles en
avant des lignes : " Je ne m'exposerai jamais assez si j'évite la perte
d'un seul de mes hommes. »
Le 28 novembre 1919, papa a reçu la Croix de Chevalier de la
légion d’Honneur. Le colonel Rauch,
commandant le 25ème RI, a écrit plein de compliments sur lui….
Il nous reste aussi son grand portrait. C’est un montage que
M.Dubois de Dinan a fait. Il a utilisé une photo d’identité et la médaille a
été ajoutée.
A l’école des garçons, la mairie de Dinan a fait poser une
plaque en marbre pour qu’on se souvienne de ce courageux soldat ….
Peut-être qu’un jour, dans bien longtemps, on se demandera
qui était Pierre Pillon ? Qui leur répondra ?
Les réactions
"Très beau travail et très
intéressant".
Didier Lechien, maire de
Dinan
"Un travail intéressant et surtout agréable à lire.
Vraiment toutes mes félicitations pour cet investissement
….
Le résultat est superbe"
Brigitte Balay, adjointe au maire
"Enthousiasmant ... belle réalisation...le travail réalisé avec les
élèves mérite d'être reconnu et encouragé ! Je suis très contente qu'il
trouve sa place à la Bibliothèque. BRAVO encore !"
Cyrille Desramé, adjointe au maire
"Beau travail !!!"
Lydie Patry, conseillère municipale
"Tout ce qui touche
la guerre de 14 est émouvant et bien qu'elle soit éloignée maintenant de 100
ans, les récits la concernant sont toujours poignants.
Peut-être est-ce dû au fait que nous avons tous conscience qu'au delà du nombre effarant de
victimes, elle a été un gâchis impardonnable pour l'Europe.
Félicitations pour
ce travail de mémoire et la participation des enfants"
Alain Montagnon,
président de l’association « Dinan Patrimoine »
"Quel magnifique
travail, très poignant et émouvant. Quel que soit le résultat, c’est déjà une
belle aventure historique pour la classe."
Johanna Virel,
bibliothèque municipale
"C'est un très beau travail…. Félicitations, c'est toujours un grand
plaisir de voir les hommes revivre ; surtout quand c'est avec un souffle de
bienveillance qu'ils reviennent vers nous. L'histoire du récit de cet
homme doit certainement être une grande aventure qui marquera les élèves."
Gilles Bourrien, professeur d’histoire à Dinan
"Bravo pour ce très beau travail, bravo au maître et bravo à
tous les élèves de la classe !"
Jean-Pierre Pillon
Les photos de la cérémonie de remise du
4ème prix départemental
A gauche Jean-Pierre Pillon, au milieu Loïc René Vilbert (directeur de la bibliothèque municipale), M.Lixon (Office des anciens combattants), Richard Fortat
A droite Mme Elisabeth Cassany (conseillère municipale) et Mme Catherine Lechien
La classe de CM2 (Anouck, déléguée de la classe, tient un des cadeaux) .... On aperçoit M. Charles Pasino (conseiller municipal), à l'arrière plan.
Jean-Pierre Pillon devant le portrait de son grand-père
Les livres offerts à la classe pour le 4ème prix départemental
Une grande photo et un article complet dans Le Télégramme
Le Petit bleu 3 juillet 2014
Ces documents ont été envoyés en juillet 2014 par M. Christian Labellie qui a travaillé sur l'histoire de poilus de Pléneuf et en particulier sur celle d'un instituteur, François Bois. Le nom de Pillon est revenu à la surface par un article de presse et M. Labellie a fait le rapprochement avec celui dont parlait François Bois dans ses correspondances. Les deux soldats se connaissaient bien puisqu'ils étaient instituteurs à l'école des garçons de Dinan à la même époque.
François Bois (une rue porte son nom à Pléneuf)
Tous nos remerciements à M. Labellie (pour sa transcription), à Michel Grimaud (généalogiste et historien local qui a transmis ces correspondances à M. Labellie) et la famille de François Bois qui nous autorise à publier ces extraits de lettres.
Lettres de guerre de François Bois
dans lesquelles il fait mention de
Pierre Pillon
instituteur à Dinan et lieutenant de
réserve au 25ème Régiment d’Infanterie
Jeudi soir (lettre de 1914 sans
précision de jour ni de mois ; vraisemblablement du mois de septembre).
François Bois, adjudant de réserve est arrivé au 47ème RI à St Malo,
suite à l’ordre de mobilisation générale, le 20 août 1914). Lettre à sa mère.
« …Pillon a dû rentrer
aujourd’hui à Cherbourg… »
19 janvier 1915 lettre à sa mère
(Expédiée de St Servan, 47ème d’Infanterie)
« …Pony est parti ce matin
pour Rennes où il va passer environ 1 mois pour devenir plus tard officier.
Cela le met à l’abri pour quelque temps. Pillon m’a écrit la semaine dernière.
Il est toujours dans les tranchées et à part les accidents trop fréquents de
son nouveau métier il s’y porte bien… »
Jeudi matin (lettre sans
quantième de février 1915. Toujours à St Servan) Lettre à sa mère
« …Pillon toujours au feu et
s’y porte bien. Mahé parti en même temps que lui a été nommé sous-lieutenant
dernièrement. On est toujours sans nouvelles de Le Moing… »
6 juillet 1915 lettre à sa mère
« …M. Pillon a été nommé
adjudant… »
27 décembre 1915 (il est alors à
St Florent et Varades) Lettre à sa mère
« …je pars ce soir pour
Dinan en permission de 4 jours…Monsieur Pillon est actuellement en permission à
Dinan. Je vais avoir le plaisir de le rencontrer… »
31 décembre 1915 (de Dinan)
Lettre à sa mère
« …Je suis arrivé ici mardi
matin à 9 heures. J’étais parti à 5 heures du soir de Varades. J’ai vu Pierre
Pillon qui est guéri de sa jaunisse. Il
est parti ce matin pour rejoindre son régiment au front. Il avait 7 jours de
convalescence … »
Lundi 17 janvier 1916 (Il est à
Ancenis, instructeur pour la classe 17 : 120ème d’Infanterie 25ème
Compagnie) Lettre à sa mère
« …M. Pillon est retourné
aux tranchées. Il ne doit pas y faire chaud… »
Samedi 7 octobre 1916 lettre à sa
mère
« …ma permission s’est bien
passée. Pas d’incidents de voyage. Pierre Pillon était reparti le dimanche
précédent pour le front… »
Mercredi 14 mars 1917 (Il est
depuis le 21 février à la 14ème Compagnie du 277ème
d’Infanterie) Lettre à sa mère
« …M. Pillon est en
permission. Il doit être maintenant tout près du retour… »
Vendredi 16 mars 1917 lettre à
son fils Georges (13 ans)
« …Monsieur Pillon est sans
doute bien près de reprendre le train pour le front. La perspective n’est pas
fort agréable mais plutôt d’une cruelle nécessité. Il est vrai qu’il est encore
commandant de compagnie c’est le paradis à côté de la vie du simple
poilu… »
Le 22 mars 1917 l’adjudant
François Bois est passé de la 14ème à la 15ème Compagnie
du 277ème régiment d’Infanterie. Il a dû avoir une permission début
avril et pendant la dernière quinzaine de ce mois cette compagnie est cantonnée
à Tremblois / Laneuvelotte à proximité de Nancy.
1er mai 1917 lettre à
sa mère
« …Francine [sa femme] m’écrit ce soir que M. Pillon
est parti pour venir de ce côté ci peut être. C’est avec plaisir que je le
verrais à nos côtés… » toutefois dans une lettre du lundi 7 mai il écrit
« …nous déménageons demain mais nous ne savons où nous allons… »
Samedi 12 mai 1917 lettre à sa
mère
« …Depuis trois jours nous
sommes arrivés. Nous ne savons toujours pas où nous irons définitivement. Pour
le moment c’est le régime de Villeseneux [localité
à une vingtaine de kms S-O de
Chalons-sur-Marne]…sans doute que d’ici une semaine nous prendrons un
secteur dans ces régions. Peut être alors…aurai-je l’occasion de rencontrer le
camarade Pillon … »
Dimanche 20 mai 1917 lettre à son
fils Georges
« …Nous ne savons toujours
point quel secteur nous allons prendre mais sans doute très voisin de celui de
M. Pillon … »
26 mai 1917 lettre à sa mère
« …Nous sommes montés aux
tranchées avant-hier. Comme j’allais reconnaître le secteur je trouve le fils
Boisnet de Lamballe. Je lui demande des nouvelles de M. Pillon. Il me répond
Nous venons de l’enterrer il y a une heure. Le lieutenant qui commande sa
compagnie est un ancien professeur de l’Ecole supérieure de Dinan. Je lui ai
causé. Il m’a raconté que M. Pillon atteint de 3 blessures ne voulait pas se
laisser évacuer. Il a été alors tué d’une balle en pleine tête. Au moment où
depuis le début de la campagne j’allais le trouver il faut que ce soit sa mort
que l’on m’annonce. J’ai monté aux tranchées avec un cafard monstre. Revenu
depuis hier près des cuisines roulantes je ne suis qu’à 5 kms du patelin où on
l’a inhumé. Je ferai tout mon possible pour aller sur sa tombe un de ces jours.
J’ai écrit aussitôt à l’Inspecteur primaire. Je n’ai pas voulu annoncer cette
triste nouvelle à Mme Pillon … »
Lundi 28 mai 1917 lettre à son
fils Georges
« …Tu me parlais de
l’attaque faite par le pauvre Pierre Pillon. Trop brave il n’a pu en sortir
vivant. Peut être vais-je aller cet après-midi sur sa tombe du moins je ferai
tout mon possible car je ne peux m’absenter lorsque le margis n’est pas
là… »
30 mai 1917 lettre à sa mère
« …J’ai été il y a trois
jours sur la tombe de M. Pillon. Elle est entourée d’un cadre peint en blanc.
Sur la croix est inscrit son nom avec la date du 21 mai 1917. Deux jolies
couronnes ornées d’un ruban tricolore ont été déposées l’une offerte par ses
camarades l’autre par ses soldats. Madame Pillon connaît cette triste nouvelle
maintenant. C’est Francine [femme de François Bois] qu’on a chargé de lui
annoncer. Peu agréable corvée mais devoir nécessaire. Je devais y retourner
aujourd’hui et lui porter quelques fleurs. Je ne le pourrai point ayant eu deux
chevaux tués hier soir au ravitaillement… »
4 juin 1917 carte de
correspondance des Armées de la République à sa mère
« …J’ai été voir la tombe de
M. Pillon. Il n’y a d’ailleurs aucun danger les Boches ne tirant plus jusque
là… »
5 juin 1917 lettre à son fils
Georges
« …J’ai été hier l’après
midi porter un bouquet sur la tombe de M. Pillon. Malheureusement il fanera
vite avec ce temps car il fait une chaleur torride… »
8 juin 1917 lettre à sa mère
« …Madame Pillon veut venir
ici si elle peut obtenir l’autorisation. Je la conduirai sur la tombe de son
mari. J’ai été il y a quelques jours pour lui porter un bouquet. Les journaux
de Dinan sont pleins d’éloges sur lui. Il est vrai qu’il les a mérités… »
12 juin 1917 lettre à sa mère
« …Madame Pillon a demandé à
venir ici. Je l’accompagnerai dans sa visite au cimetière… »
Remarque: On peut se demander si ce n'est pas François Bois qui a pris la photo de Mme Pillon et de son fils autour de la tombe ?
Dimanche 8 juillet 1917 lettre à
son fils Georges
« …Comme toi j’aurais voulu
pouvoir assister Mme Pillon au service de son mari, non pas au point de vue
religieux, mais comme ami de ce pauvre Pierre… »
Retour au sommaire en cliquant ici